Incidence professionnelle – Pas d’incidence professionnelle si virus de l’immunodéficience humaine asymptomatique

Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 8 décembre 2016, 15-28.181, Inédit

Cour de cassation – Chambre civile 2

  • N° de pourvoi : 15-28.181
  • ECLI:FR:CCASS:2016:C201758
  • Non publié au bulletin
  • Solution : Cassation

Audience publique du jeudi 08 décembre 2016

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris, du 05 octobre 2015

PrésidentMme Flise (président)Avocat(s)SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Sevaux et Mathonnet

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’à l’occasion de transfusions de produits sanguins réalisées à la suite d’un accident de la circulation dont il avait été victime le 9 juin 1982, M. X… a été contaminé par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et le virus de l’hépatite C (VHC) ; qu’après avoir agi en réparation contre l’auteur de l’accident, devant un tribunal de grande instance, il a assigné l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l’ONIAM), qui refusait de l’indemniser, en réparation de ses préjudices résultant de sa contamination par le VHC, devant un tribunal administratif, ainsi qu’en réparation de ses préjudices résultant de sa contamination par le VIH, devant la cour d’appel de Paris ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l’ONIAM fait grief à l’arrêt de dire que le préjudice de M. X… résultant de son infection par le VIH justifie l’allocation de provisions au titre de l’incidence professionnelle, du déficit fonctionnel et du préjudice de contamination, outre une indemnité en application de l’article 700 du code de procédure civile, alors, selon le moyen, qu’excède ses pouvoirs le juge qui prononce un arrêt avant dire droit et se dessaisit du soin de trancher lui-même la question de droit litigieuse entre les parties ; qu’appelée à se prononcer dans un litige opposant M. X…, qui demandait le versement de sommes, à titre définitif, en indemnisation de ses préjudices, et l’ONIAM, qui demandait soit le débouté de ses demandes, soit leur détermination selon d’autres modalités que celles demandées, ni l’un ni l’autre ne demandant à la cour d’appel le versement de provisions, la cour d’appel qui a non seulement condamné l’ONIAM au paiement de provisions mais a également mis fin à l’instance, puisqu’elle a condamné l’ONIAM sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et a précisé, dans les motifs de son arrêt, qu’il lui fallait « allouer une provision » «dont le prononcé dessaisira la juridiction sous réserve d’une saisine ultérieure», a commis un excès de pouvoir négatif et a méconnu l’article L. 3122-1 du code de la santé publique ;

Mais attendu qu’il ne résulte pas du dispositif de l’arrêt que la cour d’appel s’est dessaisie du litige ;

D’où il suit que le moyen manque en fait ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Vu l’article L. 3122-1 du code de la santé publique ;

Attendu que pour dire que le préjudice de M. X… résultant de son infection par le VIH justifie l’allocation d’une somme au titre de l’incidence professionnelle, l’arrêt énonce que M. X… voit sa force physique diminuée et menacée par l’infection du VIH ; que cette infection est de nature à limiter sa possibilité d’exercer la profession de docker, au moins jusqu’à 2006 ; que cette limitation constitue un préjudice par elle-même ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle constatait que M. X… était asymptomatique, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l’article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

Attendu que, pour l’indemnisation du préjudice corporel, la réparation des postes de préjudice dénommés déficit fonctionnel temporaire et déficit fonctionnel permanent inclut, le premier, pour la période antérieure à la date de consolidation, l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d’hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, le second, pour la période postérieure à cette date, les atteintes aux fonctions physiologiques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence personnelles, familiales et sociales ;

Attendu que pour dire que le préjudice de M. X… résultant de son infection par le VIH lors des transfusions reçues après l’accident du 9 juin 1982 justifie l’allocation des sommes de 3 000 euros au titre du déficit fonctionnel et de 70 325 euros au titre du préjudice de contamination, sous déduction des paiements intervenus, l’arrêt retient qu’en l’absence de consolidation des blessures la césure entre le déficit fonctionnel temporaire et le déficit fonctionnel permanent est illusoire, mais qu’il demeure possible d’indemniser, au moins à titre provisionnel, le déficit des périodes passées et celui prévisible ; que l’expert a retenu un déficit fonctionnel permanent de 10 % ;

Qu’en consacrant ainsi l’existence d’un déficit fonctionnel s’ajoutant au préjudice spécifique de contamination, alors qu’elle constatait l’absence de consolidation, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte et le principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 5 octobre 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit que le préjudice de monsieur X… résultant de son infection par le VIH lors des transfusions reçues après l’accident du 9 juin 1982 justifiait l’allocation des provisions suivantes : 2.000 euros au titre de l’incidence professionnelle, 3.000 euros au titre du déficit fonctionnel et 70.325 euros au titre du préjudice de contamination, sous déduction des paiements intervenus, la charge incombant au débiteur, outre la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs que la contamination par le VIH résultant de la transfusion n’est plus contestée ; que, cependant, la répartition des contentieux entre trois juridictions peut entraîner des contradictions qui pourraient être préjudiciables à M. Jean-Antoine X… aussi bien qu’à l’office d’indemnisation ; que le cumul des déficits résultant des diverses affections notamment, suppose une mise en commun des données ; que, tant que chacune juridictions n’a pas pu analyser les résultats du rapport d’expertise et avancer dans le processus d’indemnisation, il ne faut pas statuer de manière définitive mais allouer une provision dont le prononcé dessaisira la juridiction sous réserve d’une saisine ultérieure ; que la demande d’une somme comprend a fortiori celle d’une somme provisionnelle ; qu’en raison de la nécessité de respecter les diverses procédures, il faut pourtant préciser à quels préjudices répondent provisoirement ces provisions ; que, sur le préjudice professionnel, M. Jean-Antoine X… sollicite une indemnité au titre du préjudice professionnel, en faisant valoir qu’il exerçait auparavant la profession de docker qui lui est désormais interdite ; que le fonds d’indemnisation s’y oppose en faisant valoir que les difficultés rencontrées par M. Jean-Antoine X… pour exercer la profession de docker résultent de ses incarcérations et du choix d’une autre profession, entraîneur sportif privé ; que les incarcérations sont intervenues de 1986 à 1990, de 1991 à août 1992, de septembre 2002 à 2005, puis 2 mois en 2006 et de 2009 au jour de l’expertise au moins ; que M. Jean-Antoine X… répond que la profession d’entraîneur sportif ne nécessite pas la condition physique que commande celle de docker mais fait appel à des qualités de sens psychologique et de force de caractère ; qu’il reste que, lorsqu’il a été incarcéré, M. Jean-Antoine X… ne pouvait pas exercer la profession de docker ; que le préjudice n’affecte donc pas ces périodes de sa vie ; qu’aucune comparaison entre les revenus de docker et ceux d’animateur sportif n’est proposée ; qu’aucun renseignement n’est donné sur les recrutements de dockers et la possibilité de réintégrer ce métier après de telles interruptions, alors que la personne n’est plus à l’âge de sa meilleure force physique ; qu’il demeure que, quoiqu’il soit noté asymptomatique, M. Jean-Antoine X… voit sa force physique diminuée et menacée par l’infection du VIH ; que cette infection est de nature à limiter sa possibilité d’exercer la profession de docker, au moins jusqu’à 2006 ; que cette limitation constitue un préjudice par elle-même ; qu’il faut en retenir la réalité ; mais que, en raison des incarcérations et de la reconversion, ce chef de préjudice est limité ; qu’en outre, il ressort du rapport du professeur Y… (pièce 9 de Jean-Antoine X…) que, docker complémentaire, celui-ci était au chômage lors de l’accident ; qu’il justifie d’une indemnité provisionnelle de 2.000 euros ; que, sur le déficit fonctionnel, en l’absence de consolidation des blessures la césure entre le déficit fonctionnel temporaire et le déficit fonctionnel permanent est illusoire ; qu’il demeure possible d’indemniser, au moins à titre provisionnel, le déficit des périodes passées et celui prévisible ; que l’expert a retenu un déficit fonctionnel permanent de 10 % ; que, cependant, le tribunal de grande instance de Marseille a alloué à M. Jean-Antoine X… une indemnité complémentaire de 4.500 euros après déduction d’une provision de 15.000 euros en raison du passage d’une incapacité permanente partielle de 92 % au lieu des 87 % antérieurement retenus ; que cette indemnité ne concernait que les préjudices d’ORL et d’orthopédie ; que le rapport du Dr Z… (pièce 5 de M. Jean-Antoine X…) rappelait que le taux de 87 % avait été retenu par le professeur Y… en août 1991 ; que l’accident date de juin 1982 ; que l’ajout de 10 % à 92 % amènerait à un taux de 102 % ; qu’un taux est temporaire tandis que l’autre est permanent mais il s’agit du déficit fonctionnel d’une même personne durant la même période ; que l’application du taux de 10 % sur le solde de 8 % conduit normalement à un taux de 0,8 % ; que, sur le taux antérieur de 87 % laissant un solde de 13 %, le taux de 10 % revient à 1,3 % ; qu’une décision proche de la réalité supposerait la connaissance des divers taux d’invalidité depuis l’accident ; mais que cet aspect n’a pas été analysé ; qu’en l’état, il faut s’en tenir à une provision de 3.000 euros ; que, sur le préjudice résultant des souffrances et le préjudice de contamination, M. Jean-Antoine X… conclut subsidiairement à l’allocation de 132.601 euros à ce titre, ce qui est supérieur à sa demande principale de 20.000 euros pour les souffrances endurées et de 25.000 euros pour le préjudice résultant de la pathologie évolutive, limitée à la période passée ; que l’offre de l’office d’indemnisation pour le préjudice de contamination s’élève à 72.325 euros comprennent le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées et le préjudice de souffrances évolutives ; que le déficit fonctionnel temporaire n’est pas inclus dans le préjudice de contamination il faut s’en tenir à une provision de 70.325 euros pour le préjudice de contamination incluant l’indemnisation des souffrances endurées à ce jour et prévisibles ;

Alors qu’excède ses pouvoirs le juge qui prononce un arrêt avant dire droit et se dessaisit du soin de trancher lui-même la question de droit litigieuse entre les parties ; qu’appelée à se prononcer dans un litige opposant monsieur X…, qui demandait le versement de sommes, à titre définitif, en indemnisation de ses préjudices, et l’ONIAM, qui demandait soit le débouté de ses demandes, soit leur détermination selon d’autres modalités que celles demandées, ni l’un ni l’autre ne demandant à la cour d’appel le versement de provisions, la cour d’appel qui a non seulement condamné l’ONIAM au paiement de provisions mais a également mis fin à l’instance, puisqu’elle a condamné l’office sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et a précisé, dans les motifs de son arrêt, qu’il lui fallait « allouer une provision » « dont le prononcé dessaisira la juridiction sous réserve d’une saisine ultérieure » (arrêt, p. 6 § 3), a commis un excès de pouvoir négatif et a méconnu l’article L. 3122-1 du code de la santé publique.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit que le préjudice de monsieur X… résultant de son infection par le VIH lors des transfusions reçues après l’accident du 9 juin 1982 justifiait l’allocation de la provision de 2.000 euros au titre de l’incidence professionnelle, sous déduction des paiements intervenus, la charge incombant au débiteur, outre la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs que la contamination par le VIH résultant de la transfusion n’est plus contestée ; que, cependant, la répartition des contentieux entre trois juridictions peut entraîner des contradictions qui pourraient être préjudiciables à M. Jean-Antoine X… aussi bien qu’à l’office d’indemnisation ; que le cumul des déficits résultant des diverses affections notamment, suppose une mise en commun des données ; que, tant que chacune juridictions n’a pas pu analyser les résultats du rapport d’expertise et avancer dans le processus d’indemnisation, il ne faut pas statuer de manière définitive mais allouer une provision dont le prononcé dessaisira la juridiction sous réserve d’une saisine ultérieure ; que la demande d’une somme comprend a fortiori celle d’une somme provisionnelle ; qu’en raison de la nécessité de respecter les diverses procédures, il faut pourtant préciser à quels préjudices répondent provisoirement ces provisions ; que, sur le préjudice professionnel, M. Jean-Antoine X… sollicite une indemnité au titre du préjudice professionnel, en faisant valoir qu’il exerçait auparavant la profession de docker qui lui est désormais interdite ; que le fonds d’indemnisation s’y oppose en faisant valoir que les difficultés rencontrées par M. Jean-Antoine X… pour exercer la profession de docker résultent de ses incarcérations et du choix d’une autre profession, entraîneur sportif privé ; que les incarcérations sont intervenues de 1986 à 1990, de 1991 à août 1992, de septembre 2002 à 2005, puis 2 mois en 2006 et de 2009 au jour de l’expertise au moins ; que M. Jean-Antoine X… répond que la profession d’entraîneur sportif ne nécessite pas la condition physique que commande celle de docker mais fait appel à des qualités de sens psychologique et de force de caractère ; qu’il reste que, lorsqu’il a été incarcéré, M. Jean-Antoine X… ne pouvait pas exercer la profession de docker ; que le préjudice n’affecte donc pas ces périodes de sa vie ; qu’aucune comparaison entre les revenus de docker et ceux d’animateur sportif n’est proposée ; qu’aucun renseignement n’est donné sur les recrutements de dockers et la possibilité de réintégrer ce métier après de telles interruptions, alors que la personne n’est plus à l’âge de sa meilleure force physique ; qu’il demeure que, quoiqu’il soit noté asymptomatique, M. Jean-Antoine X… voit sa force physique diminuée et menacée par l’infection du VIH ; que cette infection est de nature à limiter sa possibilité d’exercer la profession de docker, au moins jusqu’à 2006 ; que cette limitation constitue un préjudice par elle-même ; qu’il faut en retenir la réalité ; mais que, en raison des incarcérations et de la reconversion, ce chef de préjudice est limité ; qu’en outre, il ressort du rapport du professeur Y… (pièce 9 de Jean-Antoine X…) que, docker complémentaire, celui-ci était au chômage lors de l’accident ; qu’il justifie d’une indemnité provisionnelle de 2.000 euros ;

Alors, de première part, que la cour d’appel a constaté que monsieur X… était « asymptomatique », c’est-à-dire qu’il ne présentait aucun symptôme, lié à son infection par le VIH, susceptible d’avoir une répercussion sur ses capacités physiques à exercer la profession de docker ; qu’en retenant que l’infection de monsieur X… aurait été de nature à limiter sa possibilité d’exercer la profession de docker, au moins jusqu’à 2006, pour lui allouer une indemnité provisionnelle au titre de l’incidence professionnelle, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l’article L.3122-1 du code de la santé publique ;

Alors, subsidiairement, de seconde part, que les juges du fond ne peuvent se prononcer par voie de simple affirmation, sans préciser les pièces sur lesquelles ils se fondent ; qu’en se bornant à affirmer péremptoirement, sans préciser les pièces sur lesquelles elle se fondait, que monsieur X… aurait vu sa force physique diminuée par l’infection du VIH, ce qui aurait été de nature à limiter sa possibilité d’exercer la profession de docker au moins jusqu’en 2006, et justifierait l’allocation d’une indemnité provisionnelle au titre de l’incidence professionnelle, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit que le préjudice de monsieur X… résultant de son infection par le VIH lors des transfusions reçues après l’accident du 9 juin 1982 justifiait l’allocation des provisions de 3.000 euros au titre du déficit fonctionnel et 70.325 euros au titre du préjudice de contamination, sous déduction des paiements intervenus, la charge incombant au débiteur, outre la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs que la contamination par le VIH résultant de la transfusion n’est plus contestée ; que, cependant, la répartition des contentieux entre trois juridictions peut entraîner des contradictions qui pourraient être préjudiciables à M. Jean-Antoine X… aussi bien qu’à l’office d’indemnisation ; que le cumul des déficits résultant des diverses affections notamment, suppose une mise en commun des données ; que, tant que chacune juridictions n’a pas pu analyser les résultats du rapport d’expertise et avancer dans le processus d’indemnisation, il ne faut pas statuer de manière définitive mais allouer une provision dont le prononcé dessaisira la juridiction sous réserve d’une saisine ultérieure ; que la demande d’une somme comprend a fortiori celle d’une somme provisionnelle ; qu’en raison de la nécessité de respecter les diverses procédures, il faut pourtant préciser à quels préjudices répondent provisoirement ces provisions ; […] que, sur le déficit fonctionnel, en l’absence de consolidation des blessures la césure entre le déficit fonctionnel temporaire et le déficit fonctionnel permanent est illusoire ; qu’il demeure possible d’indemniser, au moins à titre provisionnel, le déficit des périodes passées et celui prévisible ; que l’expert a retenu un déficit fonctionnel permanent de 10 % ; que, cependant, le tribunal de grande instance de Marseille a alloué à M. Jean-Antoine X… une indemnité complémentaire de 4.500 euros après déduction d’une provision de 15.000 euros en raison du passage d’une incapacité permanente partielle de 92 % au lieu des 87 % antérieurement retenus ; que cette indemnité ne concernait que les préjudices d’ORL et d’orthopédie ; que le rapport du Dr Z… (pièce 5 de M. Jean-Antoine X…) rappelait que le taux de 87 % avait été retenu par le professeur Y… en août 1991 ; que l’accident date de juin 1982 ; que l’ajout de 10 % à 92 % amènerait à un taux de 102 % ; qu’un taux est temporaire tandis que l’autre est permanent mais il s’agit du déficit fonctionnel d’une même personne durant la même période ; que l’application du taux de 10 % sur le solde de 8 % conduit normalement à un taux de 0,8 % ; que, sur le taux antérieur de 87 % laissant un solde de 13 %, le taux de 10 % revient à 1,3 % ; qu’une décision proche de la réalité supposerait la connaissance des divers taux d’invalidité depuis l’accident ; mais que cet aspect n’a pas été analysé ; qu’en l’état, il faut s’en tenir à une provision de 3.000 euros ; que, sur le préjudice résultant des souffrances et le préjudice de contamination, M. Jean-Antoine X… conclut subsidiairement à l’allocation de 132.601 euros à ce titre, ce qui est supérieur à sa demande principale de 20.000 euros pour les souffrances endurées et de 25.000 euros pour le préjudice résultant de la pathologie évolutive, limitée à la période passée ; que l’offre de l’office d’indemnisation pour le préjudice de contamination s’élève à 72.325 euros comprennent le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées et le préjudice de souffrances évolutives ; que le déficit fonctionnel temporaire n’est pas inclus dans le préjudice de contamination il faut s’en tenir à une provision de 70.325 euros pour le préjudice de contamination incluant l’indemnisation des souffrances endurées à ce jour et prévisibles ;

Alors, de première part, que le préjudice spécifique de contamination par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) inclut le préjudice à caractère personnel, lorsqu’il existe ; en condamnant l’ONIAM à payer une indemnité provisionnelle à monsieur X… non seulement au titre du préjudice spécifique de contamination mais également au titre du déficit fonctionnel, déjà indemnisé au titre du préjudice spécifique de contamination, la cour d’appel a violé l’article L.3122-1 du code de la santé publique, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

Alors, de seconde part, que la cour d’appel a constaté l’absence de consolidation de monsieur X…, contaminé par le VIH ; qu’en condamnant malgré tout l’ONIAM à lui payer une somme à titre provisionnel calculée à partir de données relatives à un prétendu déficit fonctionnel permanent, la cour d’appel n’a donc pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l’article L.3122-1 du code de la santé publique.ECLI:FR:CCASS:2016:C201758